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Un thriller brillant : « Gone Girl » de David Fincher (2014)

Gone-Girl_612x380_0Depuis maintenant plus d’une vingtaine d’années le réalisateur américain David Fincher propose un cinéma séduisant, intelligent et racé. Oeuvrant à l’intérieur du système hollywoodien, il s’en accommode très bien et ne cesse d’explorer de nouvelles manières d’interroger son sujet et ses personnages. Ayant depuis quelque temps abandonné le genre qui fit son succès des deux côtés de l’atlantique, la science-fiction herculéenne (Alien 3 et Fight Club), on sent une vraie passion chez lui pour le thriller haut de gamme (de Seven en 1995, en passant par The Game l’année suivante, jusqu’à Panic RoomZodiac et Millenium). Mais à mon sens c’est avec Gone Girl (2014) que ce réalisateur entre vraiment dans la cour des grands et devient une référence incontournable du cinéma mondial. Adapté d’un roman Gone Girl nous livre la lutte acharnée entre un époux et sa femme au bout de quelques années de mariage. Car qui épouse-t-on vraiment ? Vivre sous le même toit est-il un gage d’harmonie, de tendresse et de bienveillance ? Non, évidemment, nous répond le cinéaste à travers une singulière histoire de disparition. Au début du film le personnage incarné par Ben Affleck (pour une fois impeccable, comme quoi tout est possible à Hollywood) constate un 5 juillet la disparition de sa femme. Il prévient la police, et très vite on s’oriente vers l’idée d’un rapt violent. Alors s’organise une conférence de presse le lendemain de la disparition, afin de faciliter les recherches en y mêlant la population locale… Sur cette trame très classique David Fincher déroule une mécanique implacable, retrouvant la maestria avec laquelle il rendait Michael Douglas totalement cinglé dans le mésestimé The Game, premier vrai chef d’oeuvre de Fincher. Mais avec Gone Girl on est vraiment un ton au-dessus, car le spectateur ne sait jamais s’il doit prendre pour argent comptant les indices distillés tout au long du film. Et puis il y a la sublime Rosamund Pike qui gagne dans ce film ses galons d’actrice ; sa performance, hallucinante, est digne des plus grandes stars féminines dirigées par Alfred Hitchcok ou Stanley Donen. Reprenant le cours du cinéma américain classique là où l’ont laissé tomber (par fatigue ? Par dépit ?) Brian De Palma et Francis Ford Coppola, David Fincher est un des rares aujourd’hui à Hollywood à maintenir un haut niveau d’exigence. Pour notre plus grand plaisir. Un film splendide à découvrir absolument.

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Dheepan réveille-t-il le cinéma français ?

DheepanA première vue la Palme d’or de Cannes 2015 est un coup de massue dans l’inertie du cinéma français. Un réalisateur côté, un sujet sensible, des acteurs inconnus, un filmage au plus près du sujet, caméra dans le dos dans certains plans à la manière de La Loi du marché pour immerger le spectateur dans un environnement hostile (au début du film la jungle sri-lankaise et un camp de réfugiés, ensuite une cité en France). Seules les dernières images dans un quartier cossu en Angleterre contiennent des couleurs chatoyantes, illustration du soi-disant nouvel eldorado pour les migrants du monde entier (quand l’actualité la plus brûlante rejoint le cinéma actuel). Et c’est là qu’on peut se poser de nombreuses questions sur le sens politique du film. Evidemment la plupart des jeunes cinéastes français occultent complètement la question, répondant la plupart du temps avec beaucoup d’arrogance qu’ils ne s’intéressent pas à la politique, que ce sont des artistes ! Tu parles Charles ! S’il y a bien une discipline artistique éminemment politique c’est bien le cinéma, dont l’histoire est parsemée de chefs-d’oeuvre incandescents, qui près de cent ans après leur apparition continuent de donner des complexes à nos faiseurs d’images nationaux (Le Cuirassé Potemkine d’Eiseinstein, Metropolis de Fritz Lang, L’Aurore de Murnau, L’Opinion publique de Chaplin, …).

Jacques Audiard est-il un cas à part ? Oui, je crois, car ce cinéaste brillant, dont je tiens Un héros très discret (1996) pour son véritable chef-d’oeuvre, plonge à chaque film en immersion dans un sujet de société complexe, loin des discours démagogiques des uns et des autres, comme par exemple la description naturaliste de l’univers carcéral dans Un Prophète (2009). Cependant le réalisateur est un pessimiste car si on considère la narration de Dheepan on se rend vite compte que pour lui la France n’est pas et ne sera jamais un havre de paix pour les réfugiés qui veulent se reconstruire loin de la violence et des conditions aléatoires d’existence. Dans le film Dheepan va devoir retrouver ses instincts guerriers afin de survivre au milieu de la cité où il occupe l’emploi de concierge et d’homme à tout faire, et en même temps sauvegarder l’intégrité de sa « fausse » femme et de sa « fausse » fille. Mais est-ce vraiment cela la France des cités aujourd’hui ? Des zones de non-droit aussi dangereuses et criminogènes que les fire zones du Sri-Lanka ? Alors Dheepan, dans la seconde moitié du film, se transforme en justicier, en vigilante, et à la manière de Charles Bronson dans Death Wish de Michael Winner (1974) va dessouder toute la racaille malfaisante de la cité. Alors c’est ça le pacte d’intégration républicaine dans notre pays ? C’est le seul avenir qu’on vend à tout le monde ? La guérilla urbaine, la dope et les fusillades en pleine rue à coté des écoles maternelles et primaires ?

On me rétorquera qu’il ne s’agit que d’un film, évidemment, et qu’il faut surtout s’arrêter sur la proposition de cinéma de Jacques Audiard, qui est la suivante : comment fait-on un film de genre en France, à l’intérieur du carcan essentialiste du cinéma français, celui de Claude Sautet et de Maurice Pialat ? En faisant péter les plombs à un ancien tigre tamoul qui ne rêve que de paix majestueuse symbolisée par un éléphant ? Mmmouais… de qui se moque-t-on ?

Sinon, en matière de solides images et d’interprétation puissante, précipitez-vous pour aller voir Dheepan qui est quand même au-dessus du lot de la production hexagonale. Pour le constat sociologique, chacun se fera son opinion…

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Le cinéma français a-t-il encore quelque chose à dire de pertinent ? [1/3]

Des lendemains qui chantent de Nicolas Castro (2013)

Des lendemains qui chantent de Nicolas Castro (2013)

Petit exercice simple à réaliser : demandez à vos proches, à brûle-pourpoint, de vous citer un moment d’émotion lié à un film français. Ensuite comparez les dates de production des films évoqués. Combien faut-il d’années pour qu’un moment de cinéma se transforme en objet de rêverie, d’étude, de reconnaissance éternelle ? Honnêtement, depuis l’an 2000, qu’est-ce que le cinéma français a proposé de singulier, de neuf, d’original, aux spectateurs autrefois accrochés aux basques de Jean Gabin, de Gérard Philippe, de Lino Ventura ? A-t-on encore le droit de rêver quand on va au cinéma, ou bien doit-on reprendre le langage balisé, calibré, de la critique parisienne qui va se pâmer pour un navet mettant en scène des personnages antipathiques des beaux quartiers, oisifs et politiquement incorrects, se posant des questions sur le sens de l’existence dans un bel appartement de l’Avenue Montaigne ? Ou alors on va avoir droit à l’encensement de films se proposant d’ausculter le monde difficile des prolétaires et des laissés pour compte, avec une tête d’affiche pour mieux faire passer la pilule (Vincent Lindon dans La loi du marché de Stéphane Brizé, 2015). Comme cela on s’achète une bonne conscience à prix coûtant, d’autant plus que le financement de ces fameux films du milieu , qui auraient des choses importantes à nous raconter et à nous donner à voir, coûtent souvent la bagatelle de 3 à 5 millions d’euros, et dont les montages financiers complexes masquent en partie que leur seule raison d’être est de servir de véhicule à nos gloires cinématographiques  déclinantes.

En France 4 parcours se partagent l’offre cinématographique contemporaine :

- soit la mise en chantier du gros film patrimonial : Renoir de Gilles Bourdos (2012), Yves Saint-Laurent de Jalil Lespert (2014),…

- soit l’évocation du sujet de société qui tâche et qui fâche : La loi du marché de Stéphane Brizé (2015), Un français de Diastème (2015),…

- soit le flux continu de comédies débiles qui sont de formidables accélérateurs de carrière pour toutes les starlettes de la télévision française, à savoir : les comiques troupiers qui ne font rire personne (N’Gijol, Eboué, Warren Zavatta, Ramzy Bédia, Gaspard Proust, Guillon,…), les bimbos de la météo qu’on nous vend comme des actrices glamours, au secours ! (Frédérique Bel, Louise Bourgoin,… enfin il y en a tellement !), des animatrices d’émissions saugrenues (Virginie Efira, Anne-Sophie Lapix,…)

- soit le coup de poing dans la gueule à travers la promotion de films nullissimes censés choquer les bourgeois et les bien-pensants, dont le gourou reste et demeure l’antipathique réalisateur autrichien Haneke (Gaspard Noé, Catherine Breillat, dans une moindre mesure Jacques Audiard, Kervern et Delépine)

à suivre…

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