Être ou ne pas être amoureux d’une sirène ?
C’est la question que se pose le personnage incarné par Dennis Hopper dans Night Tide, tout au long de ce film délicieux de Curtis Harrington (1961). L’acteur y joue le rôle de Johnny et c’est son tout premier film en tant que leading character. En 1961 Dennis Hopper est le jeune comédien hot du moment ; après la mort accidentelle de l’icône James Dean, son copain de plateau, c’est à lui d’être lancé sous les feux des projecteurs. Et c’est stupéfiant de voir à quel point il est bon, si jeune, beau comme un dieu, embrasant l’écran, modelant à la perfection les différentes attitudes d’un jeune américain qui se veut le miroir éclaté de tous les autres. Dans Night Tide il est Johnny, un jeune matelot de l’US Navy, débarqué de son Colorado natal jusqu’à Venice, sur la côte Pacifique, traînant sa coolitude dans les bars le soir, le long du Mall éclairé aux néons.
Sur un air de jazz, une cigarette à la main, Johnny, dans son costume de marin blanc immaculé (et Rainer Werner Fassbinder s’en souviendra quand il le fera porter à Brad Davis dans Querelle (1982) vingt-et-un ans après), véhicule un érotisme latent, chafouin, éparpillé ; il est terriblement séduisant, il va par conséquent ne pas laisser indifférente une merveilleuse créature, une jolie brune à cheveux longs, répondant au doux prénom tahitien ou maori de Mora. Laquelle a l’air un tantinet esseulée au tout début du film, avant de croiser le regard de Johnny, seule à une table de café, écoutant l’orchestre de jazz qui joue merveilleusement bien, et dont la musique irradie tout le film.
Les deux tourtereaux vont s’hypnotiser, se cajoler, se plaire, s’apprivoiser mutuellement. Tout est filmé dans un noir & blanc somptueux. Et petit à petit on nous fait comprendre que Mora pourrait être une véritable sirène, cette créature mythologique dangereuse pour les humains. Ou pas.
Mais on s’en moque car on a plaisir à déambuler avec ces deux-là, qui se plaisent et nous plaisent.
Night Tide est une manière de film rêvé, restauré grâce aux bons soins du génial Nicolas Winding Refn, le méticuleux réalisateur de Drive (2011), qui est aussi un collectionneur de films fétichiste. Merci Monsieur Refn pour cette belle initiative.Précipitez-vous sur ce film merveilleux sur la plateforme gratuite de streaming de notre ami Nicolas Winding Refn à cette adresse : www.bynwr.com
Quand l’amour du cinéma transparait à ce point, il est bon et précieux de le partager.Car la véritable culture, la plus bienfaisante, est celle qui s’adresse à tout le monde.Monsieur Refn l’a bien compris, et en a fait son mantra.
Et puis, n’est-elle pas ravissante Linda Lawson, notre sirène ?