Filmer une nouvelle fois la geste d’anciens représentants de la loi, qui affrontèrent en 1879 une bande de mercenaires sociopathes, permettait durant les années 1990 de revisiter un moment fort de la mythologie des États-Unis. C’est ce qu’a entrepris le réalisateur américain d’origine grecque George Pan Cosmatos dans son impeccable Tombstone (États-Unis, Dolby Stereo, Technicolor) en 1993.
Pendant cette décennie miraculeuse pour le cinéma hollywoodien, on s’occupait de redynamiser le mythe des figures incontournables de l’Ouest : le réalisateur baroudeur Walter Hill proposait la même année que Tombstone sa vision des faits et gestes de Geronimo (Geronimo : An American Legend, États-Unis, Dolby Stereo, 70 mm prints, Panavision anamorphique, 1993), tandis que Kevin Costner s’intéressait aux Sioux dans Danse avec les loups (Dances with Wolves, États-Unis/Royaume-Uni, Panavision anamorphique, 70 mm, 1990) et que Lawrence Kasdan s’intéressait lui-aussi au fameux règlement de compte à OK Corral un après la proposition de Pan Cosmatos, dans son téméraire (et sublime également) Wyatt Earp (États-Unis, Dolby, Technicolor, Panavision anamorphique, 1994.
Avant que le vingtième siècle ne laisse sa place au suivant, il fallait faire à Hollywood un dernier tour d’horizon dans les pays des plaines et des empires Apaches, Comanches et Sioux. Il fallait revoir de plus près la geste des nations indiennes, et puis celle aussi des colons des vastes territoires du Centre et de l’Ouest, il fallait parfaire sa connaissance des événements historiques avec lesquels s’était édifiée la civilisation des États-Unis d’Amérique.
George Pan Cosmatos a décidé de raconter l’histoire de ce fameux règlement de compte à OK Corral en jouant avec un classicisme maîtrisé sur les interactions qui se développèrent entre les différents protagonistes : par exemple la relation de franche camaraderie qui existe entre les 3 frères Earp est nuancée par la distance qui s’opère entre les 2 belles-sœurs et la compagne inquiète de Wyatt. D’autre part la relation d’amitié qui soutient le partenariat guerrier entre Wyatt Earp et la plus fine gâchette de l’Ouest Doc Holliday, est contrebalancée par la progression, tout au long du film, de la tuberculose de ce dernier.
L’ombre de la mort, violente, fatidique, imprescriptible, accompagne chaque plan du film, car dès les premières minutes nous assistons au massacre d’un federale mexicain et de toute sa famille au moment de son mariage, sur le perron de son église. Les hors-la-loi ne respectent plus les saints sacrements, et vont transporter leur ignominie de l’autre côté du Rio Grande. Les foulards rouges préfigurent les rivières de sang qui couleront bientôt dans le corral de Tombstone.
Mais à Hollywood filmer une histoire, aussi passionnante soit-elle, c’est avant tout filmer des visages, des postures, des attitudes, et aussi des conversations.
Pour cela il faut avoir en sa possession de magnifiques comédiennes comme Dana Delany, Paula Malcomson, Lisa Collins, et Dana Wheeler-Nicholson, qui toutes quatre ensemble sont de la carrure d’une Gene Tierney ou d’une Veronica Lake. Ensuite Kurt Russell, Val Kilmer et Michael Biehn par exemple, n’ont jamais été aussi magnétiques et ardents.