Creed et Creed II racontaient la construction d’un lent accomplissement. Aidé par son mentor Rocky Balboa, le vieux boxeur de Philadelphie cabossé de partout, le jeune Adonis Creed, venu de Los Angeles, élevé à la dure dans des foyers et des familles d’accueil, n’avait pas profité de la vie matérielle confortable de son père Apollo Creed, une légende de la boxe. Mais épaulé par Rocky, Creed le deuxième du nom allait prendre son envol, se marier, avoir un enfant, et devenir Champion du monde des Lourds, comme son père.
Creed III (MGM, 2023), réalisé par son interprète, le formidable acteur Michael B. Jordan, nous montre que le bel édifice en apparence parfait de la vie de champion recèle en réalité des zones d’ombre, bien enfouies sous les tapis du salon. À cet égard ce film agit dans la mythologie franchisée Creed comme le faisait Rocky III : L’Œil du tigre (1982) en son temps dans celle de Rocky : les faux-semblants sont levés, car un antagoniste apparaît et oblige le héros à chausser les gants une fois encore. Désormais on ne se bat plus pour une nouvelle ceinture mais pour laver l’affront.
Damian Anderson était autrefois le meilleur ami d’Adonis Creed, au temps du foyer d’accueil à South Central, Los Angeles. On faisait les 400 coups ensemble et Damian, le plus âgé des deux, était promis à un bel avenir dans la boxe. Il était en train de monter rapidement vers le professionnalisme. Cependant, un soir, après un match gagné par K-O sur l’adversaire, ça a dérapé sévère dans L.A. Downtown. Et les deux brothers ne se sont plus jamais revus. c’était en 2002.
Aujourd’hui, 20 ans après, Adonis a raccroché les gants depuis 3 ans, depuis sa dernière ceinture de Champion du monde interfédéral. Il consacre tout son temps à sa mère malade, à sa femme Bianca, productrice de musique très en vue, et à leur adorable fille Amara, malentendante de naissance. Bientôt cet univers sécurisé va voler en éclats, car Damian refait surface.
Creed III raconte comment on s’arrange avec les vicissitudes du passé, de notre enfance, de notre jeunesse. Pendant combien de temps peut-on mettre à distance les événements qui ont fait de nous ce que nous sommes aujourd’hui ? Creed, troisième du nom, remet les pendules à l’heure : de nos jours, aux États-Unis, ce qui compte vraiment ce n’est plus trouver sa juste place au sein du bigger than life. On résout une fois pour toute l’équation du rêve américain. Et après. Que reste-t-il à accomplir qui donne encore du sens à l’existence ?
Damian, lui, s’est sculpté un corps de soldat-citoyen de Sparte, tout seul, sans l’aide de personne, et comme le pressent Duke, le coach génial d’Adonis, quelqu’un comme Damian, quand il débarque quelque part, ne vous veut pas que du bien ; car il a trop de comptes à régler avec la terre entière. Damian Anderson veut à son tour tout ce qu’Adonis Creed possède et qu’il n’a jamais eu. La confrontation aura lieu sur un ring de boxe, le seul endroit au monde où personne ne triche. Et elle fera des étincelles. De quelles manières ?
Précipitez-vous dans les salles de cinéma pour le découvrir !
[Cet article est dédicacé à mon amie américaine Joy Herbers - Vive le Colorado, et gros bisous à toi depuis la Gascogne !]