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Ciné 80 : (#6) « Top Gun »

Top Gun Le lieutenant Pete Michell, indicatif « Maverick », est un as de l’Aéronavale. Pilote surdoué, c’est aussi une tête brûlée, et lors d’une reconnaissance depuis le porte-avions où il est affecté avec son navigateur (et ami d’enfance) « Goose », il « flashe » des MIG russes. Auréolés par ce fait militaire inédit et convoqués sur le champ par l’Amiral du bâtiment, il est décide que le pilote casse-cou et son navigateur iront compléter leur formation à Miramar, en Californie, à la Fighter Weapon School, l’académie aéronavale américaine qui forme l’élite des pilotes de combat. Dans cette école, appelée Top Gun, le lieutenant Maverick va être confronté à la compétition (le meilleur élève de l’école, Iceman, devient son adversaire le plus redouté dans la course au trophée Top Gun), au sentiment amoureux (l’instructrice de l’Air ne le laisse pas indifférent, loin s’en faut), et à la perte…

Top Gun, ce film de 1986 réalisé par Tony Scott, le frère de Ridley, est devenu au fil des décennies un film-totem. Car il regroupe toutes les thématiques qui passionnaient les teenagers que nous étions dans les années 1980. La camaraderie (et pendant les années collège, c’était important), le vrombissement surpuissant des réacteurs des Grumman F-14 Tomcat, ces machines de guerre effrayantes qui nous changeaient de nos mobylettes et de nos scooters bridés.

Top Gun a par conséquent été un marqueur indélébile dans nos jeunes vies de spectateurs émerveillés, et rassemblait autant d’admiratrices de la frimousse du beau Tom Cruise que d’admirateurs de la classe naturelle du décontracté Val Kilmer. Et que dire alors de l’extraordinaire actrice de cinéma Kelly McGillis, née à Newport Beach en Californie, et vue dans Witness de l’australien Peter Weir en 1985 et dans Les Accusés de Jonathan Kaplan en 1988 ? Et nos aîné.es préféraient la présence bienveillante de Tom Skerritt, indicatif « Viper », légende vivante de l’Aéronavale, en se souvenant que cet acteur américain né à Détroit, dans le Michigan, incarnait l’emblématique Dallas dans Alien : le 8e passager du frangin Ridley Scott, en 1979.

Top Gun a pris une place à part dans la nostalgie qu’on développe vis-à-vis du cinéma US des années 1980. Il reste indéniablement ce véhicule parfait qui raconte comment on apprivoise nos premières peurs : celle de l’abandon en premier lieu, ensuite celle du renoncement, enfin celle du deuil apprivoisé et de la remise en question nécessaire avant de parvenir à prendre un chemin moralement valide dans le monde qui attend les jeunes gens.

Quand, après de nombreuses péripéties sur la terre ferme comme dans les airs, le lieutenant Maverick décide de devenir instructeur à Top Gun, on pressent que ce ne sera pas le chemin emprunté par le jeune acteur de cinéma Tom Cruise, promis à une carrière fulgurante. Près de 40 ans plus tard, cet acteur qui éclatait en pleine lumière dans ces années 1980 bénies pour lui, est sans conteste le personnage le plus puissant d’Hollywood, aujourd’hui en 2024.

Top Gun premier du nom parle aussi de cette fulgurante ascension.

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Un été avec Natalie Wood (3/5)

La lente émancipation de la "petite fiancée de l'Amérique" commence par la reproduction, à la perfection, des gestes du Music-Hall.

La lente émancipation de la « petite fiancée de l’Amérique » commence par la reproduction, à la perfection, des gestes du Music-Hall.

Un an après Une vierge sur canapé, changement de registre pour Natalie Wood en 1965, qui partage l’affiche avec la star masculine du moment Robert Redford, dans la comédie dramatique musicale Daisy Clover de Robert Mulligan. Du rôle de la psychologue ingénue qui se laisse séduire par Tony Curtis, elle passe à celui de la petite fiancée de l’Amérique (petit mythème sucré inventé par Hollywood dans les années 1930 et 1940 pour vendre des places de cinéma au plus grand nombre), qui malgré elle va tomber dans les griffes de prédateurs sexuels autrement plus carnassiers que le journaliste inconséquent du film précédent. Cette étude sociologique filmée, dansée et chantée de Robert Mulligan nous montre de quelles façons les hommes qui détiennent le pouvoir artistique et industriel s’y prennent pour araser à jamais le libre-arbitre des jeunes et jolies femmes dont ils font des esclaves consentantes. 

La jeune Daisy Clover, qui est encore mineure, vit chichement avec sa mère sur le front de mer californien. Elle tient une baraque foraine qui vend aussi des clichés des vedettes de cinéma de l’usine à rêves, et pousse la chansonnette pour dissiper son ennui. Un concours de circonstance va l’amener à devenir la nouvelle girl next door dont raffolent les américain.ne.s. On va lui faire enregistrer des chansons, tourner des films, assister à des avant-premières prestigieuses en compagnie de Myrna Loy, de Clark Gable et de Joan Crawford. Et notre jeune vedette va bien entendu s’amouracher de la coqueluche masculine du moment, le jeune acteur Wade Lewis, logé à la même enseigne qu’elle, c’est-à-dire une prison dorée dans la propriété d’un couple de producteurs à la tête du Swan Studio.

Dans ce film remarquable, où la caméra sait capter les beautés stupéfiantes de Natalie Wood et de Robert Redford (mais ce dernier n’est pas l’attrait principal du film, sa présence ne requiert l’usage que de 2 ou 3 bobines, guère plus), tous les éléments, même les plus insignifiants, sont importants, car ils soulignent l’enfermement dans lequel on maintient Daisy Clover. Par exemple, le nom du studio n’est pas anodin, Swan Studio, car en matière de cygnes noirs qui ne veulent pas jouer le jeu, à Hollywood ce n’est pas ce qui manque. La thématique du feu libérateur, qui brûle puis permet une renaissance chèrement acquise, est très bien amenée dans la dernière bobine : nous restons seul.e.s en présence de Daisy Clover, dans la maison au bord de l’océan qu’elle avait achetée à sa défunte mère avec ses émoluments de star de cinéma. Et nous nous régalons du génie comique de Natalie, qui a fait sienne la dextérité des génies burlesques d’autrefois : les Charlie Chaplin, Buster Keaton, Harold Lloyd, Laurel & Hardy… Et puis cet arrêt sur images final sur Natalie, radieuse et riant aux éclats, enfin débarrassée une bonne fois pour toutes des ces mauvais génies qui la maintenaient dans une spirale de confusion et de désarroi !

L’année suivante, en 1966, elle sera de nouveau à l’affiche avec son alter égo masculin, le mythique Robert Redford, dans le très beau Propriété interdite de Sidney Pollack.

To be continued…

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Entrez dans la ronde avec « Twisters »

Twisters Chaque été amène son lot de films qui ont pour mission de nous faire oublier, le temps d’une séance, les tracas des mois écoulés. Pour ce faire, quoi de mieux qu’un bon film-catastrophe, comme on en produisait dans les années 1970 : mais à l’heure du réchauffement climatique et de l’éco anxiété, tout ça est en train de tourner au vinaigre. Et pas sûr qu’en Californie on ait très envie de se réfugier dans une salle climatisée pour contempler des tornades destructrices pendant que 300 000 hectares sont en train de brûler dans la vraie vie. Cependant, au niveau spectaculaire et scènes ébouriffantes, ce nouveau film de tornades, Twisters (Lee Isaac Chung, 2024), comme on les aime – c’est-à-dire filmé à l’ancienne, avec des effets sonores Dolby Atmos stratosphériques - remplit le contrat. Le réalisateur Lee Chung rend terriblement oppressantes ces masses d’air dévastatrices qui ne laissent rien sur leur passage, sinon des morts par dizaines et de la désolation.

Bien calé dans son fauteuil de cinéma on joue à se faire peur devant ces images d’une nature indomptable. Et puis ce blockbuster de l’été est un écrin idéal pour présenter en tête d’affiche celui qui va régner dorénavant sur le star-système hollywoodien : Glen Powell. Oubliez une fois pour toutes les bellâtres des vingt dernières années, car sont appelés sur le trône : Glen Powell donc, et Miles Teller (ils s’affrontaient dans Top Gun: Maverick en 2022), et puis Austin Butler (qui lui embrasait les écrans la même année 2022 dans Elvis de Baz Luhrmann) ; vous y ajoutez Timothée Chalamet (qui a mis tout le monde d’accord dans le sublime diptyque Dune et Dune : deuxième partie, 2021 et 2024, de Denis Villeneuve), et vous avez le Quinté gagnant (en 5e position vous pouvez mettre qui bon vous semble).

Les 4 cités sont de toute façon appelés à régner sur Hollywood pour les 10 prochaines années. Comme autrefois Gary Cooper, Clark Gable, Spencer Tracy et James Stewart quand ils se partageaient le gâteau dans les années 1940, nos nouveaux mousquetaires masculins du circuit ont atomisé la concurrence. Un film comme Twisters, qu’on peut aller voir en famille (aucune scène du film ne mettra personne dans l’embarras), est un véhicule calibré pour tester les amortisseurs de sa vedette masculine. D’accord, le monde brûle un peu partout, mais… The Show Must Go On les ami.es.

Le blockbuster de l’été est là pour nous réconcilier avec ce que nous aimions au cinéma auparavant : visualiser en super grand format des personnages charismatiques toujours enclins à aider son prochain, en traversant des épreuves auxquelles nous autres ne survivrions pas ; puis ils s’en vont à la fin dans le soleil couchant (ou presque, on se contentera ici d’une salle d’embarquement d’un aéroport de l’Oklahoma, et c’est bien aussi), main dans la main vers des lendemains qui chantent.

Par les temps qui courent, ce n’est pas si mal.

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Un été avec Natalie Wood (2/5)

Sex and the Single Girl

En 1964 Natalie Wood est la tête d’affiche féminine da la savoureuse comédie Une vierge sur canapé (Sex and the Single Girl) de Richard Quine. Voici la phrase de présentation du film sur la plateforme OCS Ciné+ : « Un journaliste spécialisé dans la presse à scandales s’éprend d’une célèbre et ravissante sexologue, auteur d’un essai fortement controversé. »

Le journaliste en question, c’est Tony Curtis qui l’incarne, auréolé du succès phénoménal de Certains l’aiment chaud (Some Like It Hot, 1959) avec son complice Jack Lemmon, et la déesse de l’écran Marilyn Monroe. D’ailleurs, tout au long du film, il est fait référence dans les dialogues au film culte de Billy Wilder, quand plusieurs personnages secondaires trouvent au journaliste une ressemblance avec Lemmon. Et une scène en particulier, celle du peignoir, très drôle et magnifiquement rythmée, cite le travestissement de Curtis et de Lemmon dans le film de Wilder : après s’être jeté à l’eau, poussé par la psychologue éprise de lui qui tombe à la rivière elle aussi, le journaliste enfile le peignoir de Natalie Wood.

La charmante et très dynamique psychologue Helen Brown est interprétée par une Natalie Wood qui maîtrise à la perfection tous les ressorts dramatiques de la comédie américaine un brin sophistiquée. En 1964 il s’agit d’une consécration pour la jeune comédienne (elle a 26 ans seulement) qui donne la réplique au légendaire duo Lauren Bacall/Henry Fonda, des légendes du Hollywood d’avant. Mais les années 1960 appartiennent à la nouvelle génération des actrices qui sont nées dans les années 1930 et 1940, comme Natalie, Faye Dunaway et Ali MacGraw par exemple.

Richard Quine, le réalisateur, est un artisan qui maîtrise à la perfection tous les trucs et astuces du métier, et signe une comédie trépidante, qui ne se prend jamais au sérieux, et qui se moque gentiment : des hommes mariés qui mentent éhontément à leurs épouses et à leurs maîtresses, des femmes mariées esseulées qui veulent quand même continuer à croire au grand amour romantique de leur jeunesse, des journalistes nouvelle manière qui se spécialisent dans le scandale, le voyeurisme et la mauvais goût (la naissance de la presse people, déjà radiographiée par Federico Fellini dans La Dolce Vita en 1960), pendant que les psychologues et les psychanalystes en prennent aussi pour leur grade. Le film est ponctué de 3 numéros chantés et dansés dans la plus belle tradition du Music-Hall (Count Basie et son Orchestre assurent la partition musicale du film et les séquences chantées, car dans les années 1960 Hollywood aimait le jazz, et le jazz aimait Hollywood). Les gros plans sur Count Basie et sur ses musiciens en train de jouer leur musique, si belle, si entraînante, sont de purs moments de grâce artistique et cinématographique, de purs moments de bonheur absolu.

Tout est à l’unisson dans cette comédie de mœurs (ou de remariage, c’est selon) diaboliquement bien rythmée. Chacun et chacune y joue sa partition à la perfection. 

Mais nous n’avons d’yeux que pour Natalie !

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Un été avec Natalie Wood (1/5)

Natalie Wood Le temps qui passe nous éloigne de ce qui fut, et qui n’est plus. Les merveilleux films des années 1960, quand le cinéma avait trouvé son rythme de croisière et que de nouveaux procédés techniques ingénieux les rendaient stupéfiants de beauté et de charme, se sont pourtant éloignés de nous comme les baïnes de la côte Atlantique qui s’en retournent vers le grand large.

Cependant les souvenirs, eux, sont comme les volcans : endormis, assoupis, mais jamais totalement éteints. Et des visages filmés en gros plan, des lignes de dialogue, doublées ou pas, des musiques de films, des plans, des mouvements d’appareil reviennent nous hanter. Et la quiétude de l’été est propice à ce retour originel vers la beauté au cinéma. Ainsi, il faut se souvenir à nouveau de la formidable actrice qu’était Natalie Wood.

Natalie Wood, c’était le charme, la fantaisie, le prodigieux don de l’interprétation, la sensualité et le sens de la comédie. Elle savait jouer vite, juste et bien. Cette actrice américaine née le 20 juillet 1938 à San Francisco (Californie) incarne pour toujours ce que le métier d’actrice de cinéma avait à offrir de meilleur, et de plus sincère. Pour celles et pour ceux qui me lisent depuis assez longtemps maintenant, vous l’avez compris : ce blog n’est pas, et ne sera jamais, le réceptacle des cancans ou des anecdotes graveleuses qui émaillent l’histoire du cinéma. J’ai en horreur les comptes-rendus de tournages qui détaillent le sordide et le grotesque des comportements des gens de cinéma. Un livre comme celui de Kenneth Anger, Hollywood Babylone, publié chez Tristram par mon ami Jean-Hubert Gailliot et Sylvie Martigny (des éditeurs exceptionnels au demeurant), me désespère. Je préfère nettement les œuvres des critiques et historiens du cinéma Kevin Brownlow, Christopher Frayling et Gian Luca Farinelli, qui ne passent pas leur temps à débiner à longueur de pages sur tel ou telle.

C’est pourquoi ce portrait amoureux de l’actrice Natalie Wood (qui sera le tout premier chapitre de mon livre à venir Portraits amoureux des actrices du cinéma mondial) ne s’occupera que de ce que cette femme a apporté de charme mutin et de drôlerie irrésistible dans tous les films dans lesquels elle a merveilleusement joué la comédie, et le drame aussi parfois. Et ils son nombreux.

Nous commencerons son portrait au post suivant avec l’analyse de son jeu (si moderne) dans le film dont elle partageait l’affiche avec un Tony Curtis sensationnel en homme à la fois veule et séduisant, sans que jamais son jeu ne tombe dans les clichés ou les procédés. Il était pour cela bien aidé par l’interprétation au cordeau de sa partenaire féminine. Le film s’intitule Une vierge sur canapé, il a été réalisé en 1964 par le roi de la comédie domestique pour adultes Richard Quine et il a fait de Natalie la nouvelle jeune reine d’Hollywood.

To be continued…

 

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Ciné 80 : (#5) « Cluedo »

"Qui a fait le coup ?" se demandent le colonel Moutarde, Madame Pervenche et tous les autres.

« Qui a fait le coup ? » se demandent le colonel Moutarde, Madame Pervenche et tous les autres.

Mattel n’est pas la première firme de jouets qui a accolé son nom en lettres flamboyantes aux marquises des cinémas. Même si le succès fulgurant de Barbie (Greta Gerwig, 2023) a concrétisé le fantasme du jouet devenant héroïne de cinéma pour les enfants next-gen, d’autres multinationales du jouet et du jeu avaient balisé le terrain, bien avant.

Ainsi, en 1985, la société Parker, qui commercialisait le jeu Cluedo (rebaptisé Clue aux États-Unis), décidait d’en faire une adaptation pour le cinéma. Elle demandait à Jonathan Lynn et à John Landis (ce dernier était très en vue à Hollywood depuis le succès de sa superbe comédie horrifique Le Loup-garou de Londres, en 1981) de proposer un scénario qui ravirait les enfants, et leurs parents. Sous la houlette de Paramount Pictures les deux énergumènes proposèrent leur version du jeu : une comédie policière à la lisière du fantastique, avec décor de manoir hanté et avec, excusez du peu, le génial Tim Curry en maître de cérémonie.

Dès les premières images, c’est Tim Curry himself qui nous introduit dans la demeure de style gothico-victorien, où prend place l’action. Son personnage de Wadsworth, majordome du mystérieux Monsieur Corps, nous permet de faire connaissance avec les invités qui arrivent dans la lugubre maison un à un. Pourquoi ont-ils été réunis ensemble (ils sont sept en tout en comptant leur hôte) à cet endroit de la Nouvelle-Angleterre, un soir pluvieux et orageux de 1954 ? Nous n’en savons rien, et eux non plus. Pourtant, quelle joie de reconnaître le colonel Moutarde, Madame Pervenche, et ainsi de suite… (quand on est familier du jeu s’entend).

L’histoire qui nous est montrée dans Cluedo (Jonathan Lynn, 1985) est une loufoque murder mystery qui rend hommage avec beaucoup de drôlerie aux meilleurs Agatha Christie. Et Tim Curry incarne à la merveille un genre d’Hercule Poirot rajeuni et virevoltant. Et puis dans la distribution on découvre aussi un Christopher Lloyd qui triomphait dans le plus gros succès du box-office cette année-là : il s’agissait du premier volet de Retour vers le futur (Robert Zemeckis, 1985).

Cette anné-là (1985) à Hollywood, on savait faire des films hilarants qui contentaient à la fois les jeunes enfants, leurs parents, mais aussi leurs grands-parents. On appelait ça le crossover intergénérationnel. Cet art de la comédie d’aventures fantastiques ou policières est désormais perdu.

Pourtant ces films, même s’ils ne pointaient pas tous leur museau aux premières places du box-office, marchaient assez bien en salles, et ravissaient les kids fous de films et de musique que nous étions dans les années 1980. Cluedo (Clue aux États-Unis) a occupé la 107e position au Box office américain de l’année 1985, devant D.A.R.Y.L (111e) ou encore Red Sonja (Kalidor : La légende du talisman chez nous, 115e) et Enemy Mine (123e), le sublime film de science-fiction intimiste de Wolfgang Petersen. Cluedo a rapporté 14 643 997 dollars sur ses 384 jours d’exclusivité-salle dans le monde, à travers une combinaison de 1022 écrans. [sources = Box Office Mojo by IMDbPro, consulté sur internet le 09/07/2024]

C’était un score plus qu’honorable pour l’adaptation pas vraiment attendue d’un jeu de société où la réflexion prend le pas sur l’action et la fébrilité.

P.S : Je chroniquerai dans la deuxième moitié de l’année 2024 tous les autres films cités dans ce post, dans cette même rubrique Ciné 80.

P.S 2 : On peut actuellement voir Cluedo en streaming sur la plateforme de Paramount Channel, via MyCanal (en abonnement payant).

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Ciné 90 : (#12) « Impitoyable »

William Munny, veuf et élevant seul ses deux enfants, va partir dans une quête désespérée, où il pourrait perdre en chemin sa fragile humanité.

William Munny, veuf et élevant seul ses deux enfants, va partir dans une quête désespérée, où il pourrait perdre en chemin sa fragile humanité.

En 1878 un homme, William Munny, qui élève seul son garçon et sa fillette depuis la disparition de son épouse, morte prématurément (à l’âge de 28 ans) de la variole, va se remettre en selle pour traquer et punir deux cowboys. L’intrigue de ce film produit et réalisé en 1992 par Clint Eastwood, est épurée comme une tragédie ; elle met face à face dans le dernier acte deux archétypes de la brutalité de l’Ouest nord-américain : d’un côté nous avons un ancien tueur impitoyable, racheté par l’amour d’une femme, et de l’autre lui fait face un sheriff aussi brutal que les soudards qu’il aime corriger avec violence. Deux mêmes faces d’une même pièce s’affrontent avant de quitter définitivement le décor, quand les Grandes Prairies sauvages laissent la place à l’ère industrielle et au mécanisme.

Les cowboys d’antan sont fatigués, ils ne savent plus vraiment monter à cheval ni construire une charpente qui tienne droit. Des historiographes à lunettes récoltent les anecdotes et sont en train d’écrire la légende de l’Ouest, celles chères à John Ford et à Sam Peckinpah. Clint Eastwood, lui, règle ses comptes avec un genre (le western) qu’il a magnifié pendant si longtemps. Il livre avec Impitoyable (Unforgiven, Malpaso Productions pour Warner Bros., 1992) à peu près le film parfait : la réalisation, sans chichi, extrêmement classique, bâtie sur le scénario de David Webb Peoples, enluminée par la belle cinématographie de Jack N. Green et mise en musique par la sublime partition du compositeur Lennie Niehaus, offre un dernier tour de piste à Clint en vieux cowboy fatigué, éreinté, mélancolique à souhait, mais que la brutalité et les comportements sordides de ses contemporains, va faire rempiler dans l’ordre de la violence sèche et de l’abjection.

On avait cru, en 1985, que Clint Eastwood avait livré son western définitif, le sublime Pale Rider (Malpaso Productions pour Warner Bros.), dans lequel il mettait de l’ordre chez les chercheurs d’or. Nous nous étions trompé.es. La messe n’était pas encore dite, Clint en avait encore sous les éperons.

En compagnie de son vieil ami Morgan Freeman (le plus grand acteur du monde selon la légendaire critique de cinéma Pauline Kael, pourtant avare en compliments), il allait faire rugir les carabines Spencer dans la prairie ; pourtant le cœur n’y était plus. Le temps avait fait son affaire, et les vieux tueurs fatigués ne prenaient plus plaisir à occire qui que ce soit. Même accompagnés d’un kid tête-à-claque, William Munny et Ned Logan savaient leur quête vaine, et cruelle.

Ce film de 1992 qui clôture en beauté une certaine idée du cinéma (qui n’a malheureusement plus cours aujourd’hui) résumait la situation à peu près comme ceci : si on ne croit plus aux quêtes, même inutiles, autant laisser en paix et paître tranquillement les chevaux et les poneys ; et aller vendre des étoffes à San Francisco.

À quoi sert d’être impitoyable si on n’a plus le choix ?

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Embarquement immédiat pour « La Planète des singes: Le nouveau royaume »

©The Walt Disney Company

©The Walt Disney Company

56 ans déjà que la saga de la Planète des singes a été initiée. Le tout premier film date de 1968 et peut se revoir à l’infini, tant son propos comme la beauté plastique de ses scènes n’ont pas pris une ride. En adaptant le roman de Pierre Boulle les créatifs hollywoodiens n’avaient sans doute pas à l’esprit que près de 60 ans plus tard cet univers simiesque continuerait de nous proposer un émerveillement que son succès actuel ne fait que confirmer.

En effet, cette nouvelle Planète des singes: Le nouveau royaume (2024, 20th Century Studios) est déjà un très grand succès : au moment où j’écris ces lignes le film de l’américain Wes Ball avait regroupé en France métropolitaine 1 434 307 spectateurs et spectatrices en 2 semaines d’exploitation en salles (sources = www.premiere.fr/Cinema/News-Cinema/).

Cette saga nous accompagne depuis toujours. Résumons : en 10 films de cinéma et une série télévisée nous avons appris à aimer et à chérir les aventures de nos chimpanzés, bonobos, orang-outans et gorilles favoris. Nous aimons aussi à la folie les méchants singes, héros de cinéma charismatiques, qui comme Proximus veulent dominer le monde (ce qui en fait des méchants très james-bondiens).

Ce nouveau film, réalisé par le très talentueux Wes Ball, qui a réalisé la trilogie pour adolescent.es Le Labyrinthe en 3 volets, a eu les coudées franches pour nous offrir une aventure haut de gamme, aux images tout bonnement époustouflantes. Les artistes et ingénieurs de WETA ont fait un travail bluffant : les singes du film sont hallucinants de réalisme et de vraisemblance, et les plans panoramiques de ce monde dévasté (le nôtre dans pas trop longtemps si on ne fait pas plus attention que ça à notre environnement) sont d’une beauté à couper le souffle. 

Trois cents ans après l’avènement de César le chimpanzé génétiquement modifié qui mena la révolte des singes, trois jeunes chimpanzés, deux mâles et une femelle, qui appartiennent au Clan des Aigles, constitué de singes pacifiques vivant en harmonie avec leur environnement naturel, vont subir les assauts de cohortes menées par le bonobo Proximus ; ce dernier rêve d’un empire des singes tout-puissants. Pour Noa, le jeune chimpanzé le plus dégourdi du Clan, la grande aventure va alors commencer. En s’alliant à un orang-outan philosophe et bienveillant, Raka, et à une jeune humaine énigmatique, Mae, Noa va sonner l’heure de la révolte.

Ce film à grand spectacle à la fois érudit, spectaculaire et familial, continue la belle aventure de la saga de la meilleure des façons. Laquelle, avec Wes Ball aux manettes, est en de bonnes mains. Nul doute que deux prochains long-métrages de cinéma viendront compléter ce qui s’annonce comme une nouvelle trilogie, aussi belle et spectaculaire que celle de Rupert Wyatt et Matt Reeves de 2011 à 2014.

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United States on fire : « Civil War » d’Alex Garland

Kirsten Dunst nous offre une interprétation époustouflante, dans la peau de la coriace photographe de guerre Lee.

Kirsten Dunst nous offre une interprétation époustouflante, dans la peau de la coriace photographe de guerre Lee.

Le cinéma US possède cette capacité déconcertante à traiter l’actualité la plus chaude au moment opportun. Même si celui qui dirige cette superproduction pleine de bruit et de fureur est anglais (Alex Garland est né à Londres en 1970), le sujet du film renvoie immanquablement aux points les plus chauds de la planète : le front entre l’Ukraine et la Fédération de Russie, la bande de Gaza, le Yémen, pour ne citer que les plus médiatisés. D’ailleurs, dans Civil War (2024) on suit à la trace des journalistes de guerre (reporters photo et de la presse écrite) qui suivent le conflit qui se déroule entre une armée sécessioniste (celle de la Californie et du Texas, rejointes par celle de Floride) aux prises avec les troupes loyalistes fidèles au président des États-Unis à cravate rouge (vous voyez à qui on fait explicitement référence ? Mais ils furent nombreux les présidents des États-Unis à porter des cravates de cette couleur, non ?).

En regardant ce film de politique-fiction dystopique, on ne peut s’empêcher de penser aux mouvements de protestation et de révolte qui embrasent la démocratie américaine au moment où le film sort dans nos salles de cinéma. Alex Garland, réalisateur total freak à la manière de Stanley Kubrick, de David Fincher et de Christopher Nolan, doté d’un budget hollywoodien confortable (A24 et Metropolitan Films se sont associés pour le financer), livre sa vision des événements : quand on s’affronte sévèrement sur le terrain (les scènes de fusillades entre factions armées sont traumatiques et restent longtemps en bouche) l’inhumanité règne ; et les femmes photographes de guerre (l’une toute jeune, qui débute dans le métier, et l’autre qui est une référence dans la profession) vont devoir s’armer de courage pour affronter ensemble des faits et gestes qui neutralisent toute compréhension de ce qui se passe.

Les enjeux sont terribles pourtant : car à chaque décision qu’on prend, comme s’arrêter pour faire le plein d’essence, ou bien bifurquer ou non à un carrefour en rase campagne, il s’agit ni plus ni moins de continuer à vivre pour témoigner, ou de mourir violemment. Civil War est un film impressionnant, maîtrisé de bout en bout, car il respecte scrupuleusement le cadre spatio-temporel dans lequel évoluent du mieux qu’ils peuvent ses personnages attachants et désemparés. On n’oubliera pas de sitôt Lee, Joel, Jessie et Sammy tant les quatre interprètes qui leur donnent vie nous offrent une magistrale leçon de jeu au cinéma, au plus près de la vie et de la souffrance qui l’accompagne parfois.

Alex Garland a fait œuvre salutaire en nous proposant en salles ce film qui fera date : Civil War est une œuvre marquante de l’année cinéma 2024, qui devrait figurer en bonne place dans nos listes à venir des meilleurs films de cette année.

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Ciné 90 : (#10) « True Romance »

Patricia Arquette et Christian Slater illuminent cette ode aux comédies policières d'antan.

Patricia Arquette et Christian Slater illuminent cette ode aux comédies policières d’antan.

Revoir True Romance, le film de Tony Scott, le frère de Ridley, trente-et-un ans après sa sortie en salles, c’est se replonger illico dans ce renouveau du cinéma hollywoodien, dont la figure de proue était Quentin Tarantino. Fort du succès de son Reservoir Dogs en 1992, et accompagné par les jumeaux maléfiques Weinstein, l’américain fort en gueule pouvait désormais placer n’importe lequel de ses scénarios, il était assuré de les voir se concrétiser en films de cinéma.

Ainsi, entre ses deux premiers films (Reservoir Dogs, donc, et Pulp Fiction, Palme d’Or au Festival de Cannes 1994), Tarantino avait confié la mise en images de son True Romance à celui qui avait donné un sacré coup de balai au Nouvel Hollywood des années 1970 : Tony Scott. Tony, son frère Ridley Scott, et quelques autres (Adrian Lyne, Joel Schumacher, Wolfgang Petersen, John McTiernan, …) avaient incarné la décennie 80 avec des films de pur divertissement gigantesques, comme Black RainLegendTraquéeLe Flic de Berverly Hills 2, Les PrédateursFlashdance9 semaines 1/2Génération PerdueL’Histoire sans finEnemyPredator, Piège de cristal.

Du coup, en concurrence directe avec ces mavericks de l’entertainment cinématographique, les vétérans de la décennie précédente (les Spielberg, De Palma, Scorsese, Eastwood, Friedkin et autres) montraient qu’ils en avaient encore sous le sabot. Ce qui nous valait une ribambelle de films extraordinaires pendant au moins deux décennies (les 80′s et les 90′s).

Oui, d’accord, mais True Romance dans tout ça ? De quoi ça parle ?

À Detroit, Clarence, un jeune homme passionné de cinéma et de pop culture, aimerait bien avoir une petite amie qui aurait les mêmes goûts que lui. Ça tombe bien, une jeune blonde très belle, Alabama, très désinvolte aussi, qui vient de débarquer de Floride, jette son dévolu sur lui. Ils forment très vite un couple très amoureux, mais il y a un hic : car Alabama est sous la férule de Drexl, mac et dealer de drogue de la pire espèce. Alors les ennuis vont arriver comme les B-52 dans le ciel allemand en 1942, c’est-à-dire en escadrille.

On retrouve dans True Romance tout ce qui a fait le succès des 3 premiers films de Tarantino (après, il se prend trop au sérieux à mon goût, la magie n’opère plus de la même façon) : des situations tordues couplée à des dialogues hilarants, un sens du cadre jamais mis en défaut, et une distribution aux petits oignons (Christian Slater, la sublime Patricia Arquette, Dennis Hopper, Gary Oldman, Tom Sizemore, Chris Penn, Christopher Walken, Val Kilmer en super-guest de luxe, la classe américaine, quoi !).

Bon, eh bien, cette litanie de films géniaux aura duré l’espace de deux décennies à peine (d’où le nom donné aux rubriques Ciné 80 et Ciné 90). Mais on peut les voir et les revoir à l’infini, et on ne sera jamais déçu.e, car la magie opère à chaque fois. Le soin apporté aux images, à la musique, au cadre, à l’interprétation, témoignait d’un profond amour et d’un très grand respect pour le cinéma de divertissement pour adultes et jeune public.

Très prochainement nous reviendrons en détail sur une merveille de film, dans notre rubrique Ciné 80 : il s’agit de l’indémodable Breakfast Club (1985) du regretté John Hughes.

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